8 Oct
2018
Signé Dumas ou l’intérêt bien compris de chacun !

Que voila une pièce dense et presque existentielle dans SA question !

Qui est l’écrivain : celui qui apporte les idées

ou celui qui donne le style ?

Quand on le voit sur scène, imposant, important, insolent de santé avec son ventre saillant, ses cheveux en désordre et son sourire gourmand, on s’imagine sans peine Alexandre Dumas au pinacle du succès, connu, aimé, troussant dans la paille quelque créature peu farouche, toujours sans le sou, mais inventif dans sa résolution !

 

L’oeil se porte ensuite sur le deuxième personnage, assis devant son bureau, à la tâche, trempant sa plume dans l’encrier. Son exact contraire : tout de sombre habillé, mince tâcheron, méticuleux, tendu vers le travail, affligé d’une femme souffreteuse, précautionneux dans sa gestion financière… Il est Auguste Maquet le collaborateur de Dumas, sur la scène comme dans la vraie vie.
Bref, les deux se complètent, l’un voyant large, l’autre attaché au détail, l’un visionnaire, l’autre appliqué à l’écriture et ses limites. Le public assiste à l’avancée littéraire du « Vicomte de Bragelonne ».
Coup de théâtre en la personne d’un maréchal des Logis qui annonce le coup d’Etat de 1848. Aussitôt, Dumas veut écrire une missive, prenant le pari de la régence plutôt que la république, se voyant déjà ministre ! Et la Maquet marque le pas, refuse de rentrer dans ce jeu qui risque, dit-il « de mettre en danger NOS intérêts » C’est l’étincelle qui enflamme Dumas et révèle le nœud de l’histoire.

Et c’est le génie de l’écriture et du jeux des acteurs, un balancier qui fait éructer l’extravagant et colérique Dumas, lui l’auteur de tous ses romans, réclamé du public, face à un Maquet rétréci sous l’humiliation infligée, qui subit la salve des attaques furibardes du grand romancier. Balancier, quand Maquet, dans un jeu d’aller et retour, retrouve la verve pour prouver à l’autre qu’il n’est rien sans lui, pas capable d’écrire, de composer, d’organiser les chapitres…

Formidablement interprété par Xavier Lemaire en truculent Dumas et Davy Sardou, en Maquet besogneux bien utile, chacun joue son rôle. Qui domine l’autre ? Pas forcément celui qu’on croit !

Gardons le suspense, courrez au théâtre La Bruyère, vous ne serez pas déçus.

Signé Dumas, théâtre La Bruyère, 5 rue la Bruyère 75009 Paris, tel : 01 42 81 35 23. Mise en scène Tristan Petitgirard, texte Cyril Gély et Eric Rouquette.