17 Nov
2020
Le métier de mourir, le dernier roman de Jean-René van der Plaetsen

Une ode au métier de soldat, voilà le message sous-jacent à chaque page de ce roman qui tient en haleine d’un bout à l’autre. Un bel hommage à ceux dont le métier est de défendre autrui pour mourir dans l’Honneur.

Est-ce parce qu’il fut Casque bleu au Liban dans une autre vie que Jean-René van der Plaetsen, aujourd’hui directeur délégué au Figaro Magazine, nous livre ici ce magnifique roman dont l’action se situe au Sud Liban, dans un paysage magnifique de fin du monde, dans un environnement hostile où la tension monte à chaque instant ?

Sans doute.

L’histoire de la vie d’un soldat, Belleface, rompu au métier des armes, tout enfoncé dans une tristesse profonde  qui se remémore sa vie, par bribe, entre amour fou pour une jeune femme, faits d’armes en Asie, enfance heureuse en Pologne, fin tragique dans un camp de concentration de se famille…Et peu à peu émerge entre réflexion métaphysique sur le sens de la vie  et quotidien sur cette base israélienne, le mystère de cet homme. Et présent tout au long du livre, les citations de l’Ecclésiaste par lui citées, sont comme un fil qui le retient et lui renvoie sa vie, si simple et si compliquée, si utile et si vaine, si heureuse dans son enfance et si apparemment sans émotion aujourd’hui. Car l’arrivée sur la base d’un jeune-homme français, Favrier, idéaliste et attentif va réveiller les sentiments de Belleface et la rencontre de ces deux âmes provoquer une inclination réciproque, fascination chez le jeune français qui l’estime et le respecte comme un père qu’il regrette de n’avoir pas eu aussi bien, attirance filiale et exigeante  chez Belleface qui se dit que ce jeune homme bien formé et aguerri serait le fils rêvé et aimé qu’il n’a pas eu le temps d’avoir.

Et insidieusement la tension monte dans le livre dont on ne décroche pas, on attend l’attentat voulu par le Hezbollah et pressenti par le héros. On retient son souffle, emporté par l’histoire peu à peu dévoilée de cet homme hors du commun et du jeune Favrier. Tension de l’histoire valorisée par une écriture dense. Chaleur palpable, sueur, eau glacée vite réchauffée, histoire d’une vie et qu’est-ce qu’une vie réussie…?

La fin brutale nous coupe le souffle et on s’était si bien attaché aux protagonistes qu’on reste tout triste.. Déjà fini, mais oui ! Retenons pour nous le message.

   Pourquoi un tel livre laissons la parole à l’auteur qui a mis beaucoup de lui-même dans le roman.
Il précise:
 –  » En effet, je n’aurais jamais pu écrire ce livre si je n’avais pas été Casque bleu en cette année 1985 au Liban-Sud.
Je n’aurais jamais pu l’écrire non plus si mon grand-père, le héros de mon précédent livre  (la Nostalgie de l’Honneur, septembre 2017, couronné de nombreux prix notamment  le prix Interallié, le prix Jean Giono) , ne m’avait pas raconté l’incroyable histoire de cet homme, survivant des camps de concentration mu par un désir de vengeance qui rappelle celui d’Edmond Dantès dans Le Comte de Monte-Cristo ».
 Jean -Rene van der Plaetsen poursuit:
– « Avec sa sérénité implacable, acquise grâce à la lecture quotidienne de L’Ecclésiaste, ce magnifique livre de sagesse de L’Ancien Testament, et son recours nocturne à l’opium pour trouver l’oubli dans ses rêves, Belleface incarne et symbolise notre condition humaine – une condition douloureuse, mais digne et courageuse face à la souffrance.
A la fin du roman, tragique parce que je voulais laisser ainsi entendre que la transmission ne s’opère plus entre les générations, le Vieux se met à pleurer pour la première fois depuis la mort de sa famille – et celle de Ruth. Cela signifie qu’il a retrouvé l’usage de ses sentiments et qu’il est de retour parmi les hommes ».
  Tout est dit de la grandeur et de la misère humaine.

Le Métier de Mourir, de Jean-René von der Plaetsen, chez Grasset.